Les cyclones sont-ils machos ?

Publié le par Claire Gagnière

… et 5 questions que vous ne vous étiez jamais posées sur le changement climatique.

 

Un article passionnant de l'Eurodéputé Nicole Kiil-Nielsen

 

1. Les cyclones sont-ils machos ?

Oui. Les cyclones, inondations, tremblements de terre, etc., ne touchent pas les hommes et les femmes de la même façon : les femmes ont jusqu’à 14 fois plus de risques de mourir lors d’une catastrophe naturelle. L’une des premières études qui a permis d’établir cette inégalité a été réalisée suite au tsunami de 2004 en Asie, par l’association Oxfam. Pour la première fois, on découvre qu’une catastrophe naturelle fait beaucoup plus de victimes chez les femmes que chez les hommes. Et ça ne s’arrête pas aux portes de l’Europe : lors de la canicule en 2003, 70% des victimes étaient des femmes.

Les raisons de cette différence se résument à un problème d’égalité : souvent les femmes sont dans une situation économique plus précaire, elles n’ont donc pas les moyens ou le droit (interdiction de quitter la maison seule) de fuir ou de s’adapter. La différence se joue aussi sur l’accès à l’information : pour se préparer à réagir à une catastrophe, il faut savoir ce qui peut se passer et comment y réagir. A l’inverse, lorsque les femmes sont mises en responsabilité, on obtient des résultats satisfaisants sur les deux fronts : la ville de La Masica au Honduras, grâce à un système d’alerte et de gestion des catastrophes qui incluait les questions de genre, a été la seule à n’enregistrer aucun décès pendant et après l’ouragan Mitch en 1998.

 

2. Est-ce qu’une innovation technique va nous sauver à la dernière minute ?

Si l’on ne peut pas prédire l’avenir, on peut en tous cas s’y préparer. Et d’après les sondages, les femmes et les hommes n’ont pas du tout la même vision des solutions à apporter au changement climatique. Les hommes sont beaucoup plus nombreux à croire en une solution « miracle » que la technologie pourrait apporter, tandis que les femmes sont prêtes à agir dès maintenant en changeant en profondeur les comportements et les habitudes pour diminuer leur empreinte écologique. Les femmes prennent également le risque climatique plus au sérieux que les hommes (étude menée dans le cadre du projet LIFE en Allemagne). Il y a donc une double opportunité : renforcer la présence des femmes dans les métiers techniques et scientifiques, pour participer à construire ces solutions, mais aussi promouvoir l’adoption d’un modèle de consommation viable.

 

3. Depuis la nuit des temps, ce sont les hommes qui ramènent la nourriture et les femmes qui cuisinent non ?

En fait non. Les femmes sont responsables de 80% de l’agriculture en Afrique par exemple, et elles sont également responsables de la collecte de l’eau et des combustibles pour préparer la nourriture. Malgré ces responsabilités, elles sont les dernières à se nourrir dans le foyer, ce qui les expose plus souvent à la malnutrition et aux carences. En dépit de ce rôle clé joué sur le plan agricole, elles n’ont en plus pas accès à la propriété des terres (les femmes possèdent moins de 1 % des ressources mondiales).

Quel est le rapport avec le changement climatique ? Les impacts du changement climatique sont déjà très concrets pour de nombreuses femmes, qui doivent adapter la recherche de ressources et les cultures aux contraintes climatiques. Ecouter l’expérience de ces femmes, qui sont souvent coupées du monde politique où les décisions sont prises, permet de mettre en place des projets climatiques qui respectent l’environnement et l’humain.

 

4. Si on résout le problème du changement climatique, on sauve tout le monde en même temps ?

Il n’y a pas une solution unique au changement climatique, mais les choix politiques qui seront faits pour s’attaquer au problème sont déterminants, et ne sont pas du tout équivalents. Puisque les effets du changement climatique ne sont pas les mêmes selon les personnes concernées, il est essentiel d’adapter au maximum les solutions en fonction de la vulnérabilité des personnes touchées. Si l’on ne prend pas en compte les propositions et la situation particulière des individus, notamment les femmes, ou les peuples indigènes, qui sont discriminés dans l’accès à la sphère politique, économique, aux ressources, on risque d’aggraver leur situation en voulant résoudre les problèmes environnementaux.

Nous disposons déjà de plusieurs exemples où ce lien entre les femmes et le changement climatique permet d’enclencher un cercle vertueux. En Inde, l’Université aux pieds nus propose des formations aux personnes défavorisées depuis 1972. Depuis l’année dernière, le projet d’électrification des villages par les panneaux solaires s’est concentré sur la formation de femmes de la caste des intouchables. Le projet propose d’électrifier des villages isolés, à condition qu’ils s’engagent à envoyer des femmes pour recevoir la formation d’ingénieure puis à leur donner les moyens d’exercer leur métier.

 

5. Un kilo de CO2 émis par une femme = un kilo de CO2 émis par un homme ?

Revoilà le problème classique du kilo de plume et du kilo de plomb. Un kilo de CO2 émis par un homme une femme a en effet le même impact sur la planète a priori. Mais l’empreinte carbone des femmes est largement inférieure à celle des hommes, en raison aussi des discriminations dont elles sont victimes. En France par exemple, d’après une étude de 2011, les hommes émettent 39,3 kg de CO2 par jour contre 32,3 pour les femmes (étude de l’INSEE). Cela se retrouve dans les autres pays européens où des études similaires ont été conduites, jusqu’à 22% de consommation d’énergie en plus pour les hommes suédois, et 39% chez les Grecs.

 

6. L’eau potable peut-elle apprendre à lire aux filles ?

Oui. L’accès à l’eau potable et à des équipements sanitaires a un lien direct avec le taux de scolarisation des filles. L’équation au final est simple : plus les femmes et les jeunes filles ont accès facilement à l’eau potable, moins elles ont besoin de temps pour cette tâche qui leur est souvent exclusivement attribuée. Le temps libéré leur permet d’aller à l’école. Un exemple de bonne pratique : au Maroc, la Banque Mondiale a monté un projet dans 6 provinces rurales d’assainissement et d’accès à l’eau potable, et le taux de scolarisation des filles a augmenté de 20% sur quatre ans.

 

 


 

Publié dans Ecologie

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article